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Je Donne

Une éducatrice au parcours atypique

Grâce aux STIM, la diplômée mcgilloise Dianea Phillips fait jaillir des étincelles dans les yeux des jeunes mal desservis

Dianea Phillips

À 40 ans, Dianea Phillips (B. Éd. 1985) a vécu son premier vol en apesanteur.

« J’ai eu le coup de foudre pour l’aérospatiale. J’adore tout ce qui vrille et tout ce qui vole. Et si ça transforme la matière, c’est encore mieux! », s’exclame cette éducatrice accréditée en aérospatiale.

Ce vol en apesanteur était le clou du camp spatial du U.S. Space and Rocket Center de Huntsville, en Alabama où, pendant 10 jours, elle a vécu le quotidien d’un astronaute à l’entraînement aux côtés de participants venus du monde entier. 

Dans un certain sens, ce camp a permis à Dianea Phillips de réaliser son rêve. Au primaire, elle souhaitait ardemment étudier en sciences et en mathématiques; au secondaire, elle voulait être pilote. Seulement voilà : chez les personnes de sa génération, c’étaient là des aspirations résolument masculines. 

« Moi, c’étaient les sciences et les mathématiques qui me passionnaient, mais j’avais l’impression qu’on me mettait toujours des bâtons dans les roues », se remémore-t-elle.

Ce sentiment d’être gênée par des entraves, elle ne l’a jamais oublié. C’est pourquoi elle transmet aujourd’hui sa passion pour les STIM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques) à des enfants qui, autrement, n’auraient peut-être pas accès à ce type d’apprentissage. Elle en a même fait une carrière. 

« Si nous ne faisons pas naître la passion chez un enfant, il deviendra un jeune adulte rempli de doutes face à l’avenir, dit-elle. Je veux dire aux jeunes que leur avenir leur appartient, qu’ils et elles ont le droit absolu et tout à fait légitime de se tracer un parcours à leur image. » 

Se tracer un parcours à son image, parsemé de sciences et jalonné d’élèves : c’est exactement ce qu’a fait cette diplômée en sciences de l’éducation. 

Après avoir obtenu son diplôme de McGill, elle a commencé à enseigner au Nunavik, dans le Nord-du-Québec. La plupart de ses élèves ne parlant ni le français ni l’anglais, elle a usé de créativité en mettant au point des techniques d’apprentissage pratique qui lui permettaient de transcender la barrière linguistique. Par la suite, elle a été enseignante pendant 25 ans à la Commission scolaire Lester-B.-Pearson – commission scolaire anglophone la plus importante du Québec – et a dirigé son Centre d’excellence en pédagogie, instance vouée à la formation des maîtres et à l’enseignement en sciences qui a été en place pendant dix ans. 

Aujourd’hui entrepreneure et « professionnelle multiplateforme » (ce sont ses mots), Dianea Phillips met à profit son parcours atypique d’enseignante, de conteuse et d’accompagnatrice jeunesse pour faire découvrir les STIM et l’espace aux jeunes par des activités menées tant en classe qu’à l’extérieur de l’école. 

Ainsi, elle dirige divers programmes de STIM et de STIAM (STIM assortis d’un volet « arts ») qui s’adressent aux jeunes de la grande région montréalaise, notamment Enchanting Tales Storytelling (pour les écoles et les bibliothèques) et Science Yourself! No G’s About It!. À l’automne 2020, elle a lancé, dans l’Ouest-de-l’Île, une « école spatiale » qui propose des programmes comme STEMGENUITY et NASA SPARX. Grâce à ce dernier programme, projet pilote inspiré du programme Next-Gen STEM de la NASA, Dianea Phillips souhaite faire découvrir l’aérospatiale à des jeunes scolarisés à domicile ou appartenant à des groupes sous-représentés et mal desservis. 

Le travail exceptionnel qu’accomplit Dianea Phillips pour initier les jeunes à l’aérospatiale lui a valu le prestigieux Cherri Brinley Outstanding Educator Award, qui lui a été remis cette année à l’occasion de la Space Exploration Educators Conference, tenue au Space Center Houston. À ses yeux, ses divers champs de compétence sont inextricablement liés et se complètent, ce qui lui permet d’offrir aux jeunes un apprentissage plus riche et plus percutant.

« La narration peut fort bien s’inviter dans la sphère spatiale, et vice versa; la sphère spatiale peut enrichir l’accompagnement personnel des jeunes », explique cette accompagnatrice personnelle accréditée pour œuvrer tant auprès des adultes que des jeunes. « On peut réaliser une expérience scientifique pour démontrer ce qu’est la force. Par exemple, avec un enfant, nous pourrions bâtir une tour au moyen de spaghettis. En érigeant sa tour, l’enfant éprouve ce qu’est la puissance. Et lorsqu’elle s’effondre, il apprend la résilience, il apprend qu’il faut savoir rebâtir. Tous ces apprentissages sont reliés. »

Lorsqu’elle a entendu parler du tout nouveau Programme de mentorat de l’Association des diplômé(e)s noir(e)s de l’Université McGill, Dianea a vu dans cette possibilité d’agir comme mentore un prolongement naturel de sa vocation. Dans le cadre de ce programme, des étudiant(e)s noirs sont jumelés à des membres noir(e)s de la communauté diplômée, du corps professoral ou du personnel, qui les accompagneront dans leur évolution personnelle et professionnelle. Elle allait enfin pouvoir être la source d’inspiration, le modèle auquel elle-même aurait voulu pouvoir s’identifier pendant ses études.

« Je n’avais pas de mentore noire », déplore Dianea, qui a entrepris ses études de premier cycle en sciences de l’éducation à McGill à la fin de la vingtaine. « C’est terrible de ne pas voir de femmes noires plus âgées que soi dans des postes d’influence. Il faut voir ces personnes pour savoir qu’elles existent. » 

Elle espère que le programme de mentorat connaîtra un vif succès et que d’autres membres noir(e)s de la communauté diplômée le rejoindront pour épauler les étudiantes et étudiants noirs. 

« Nos jeunes ont besoin de nous. Ils ont besoin de notre expérience, de notre sagesse, de notre vécu et de notre écoute, plaide Dianea Phillips. Mais surtout, il faut qu’ils et elles sachent qu’il y a des gens prêts à mettre leur précieux bagage de vie à leur disposition. »