Lors de sa première semaine à McGill en 2023, Simone Miklosi a participé à une journée de bénévolat à la Réserve naturelle Gault, où elle a fait part de ses travaux de recherche en biologie au public.
« J’ai été stupéfaite d’apprendre que McGill possédait une réserve naturelle », raconte Simone Miklosi, qui étudie les communautés aquatiques dans le cadre de ses études doctorales.
La doctorante était de retour à la réserve Gault cet été-là, mais cette fois pour effectuer des recherches sur terrain dans la réserve située sur le mont Saint-Hilaire, à environ 50 minutes du centre-ville de Montréal.
Station de recherche de la Faculté des sciences de McGill, la réserve Gault joue un rôle actif dans la collectivité. La moitié de la réserve est accessible au public, offrant 25 kilomètres de sentiers de randonnée pittoresques, alors que l’autre moitié est préservée. L’ensemble de la réserve incarne le processus scientifique, une moitié servant de zone expérimentale, et l’autre, de zone de contrôle, ce qui favorise l’équilibre entre l’accès du public et la conservation.
L’une des quatre personnes lauréates d’une bourse de recherche Gault 2024, Simone Miklosi a étudié les effets du stress thermique sur le méné à grosse tête, une espèce de poisson indigène du Québec.
« J’étais vraiment emballée », raconte Simone Miklosi, de recevoir une bourse de 6 000 $. Tout d’abord, « cela signifiait que mes recherches étaient reconnues et que les gens y croyaient. »
L’étudiante au doctorat est restée 16 jours dans la réserve, dans un minuscule chalet adjacent à son site d’expérimentation, et a utilisé les installations de laboratoire de la réserve Gault. C’était la première fois qu’elle menait une expérience en plein air. « J’étais un peu nerveuse, mais les installations sont très bien entretenues, et tout le personnel sur place est très aidant », dit-elle. Non seulement Simone Miklosi a pu mener son expérience, mais elle affirme également que « cela a vraiment contribué à enrichir mon expérience sur le terrain ainsi que mes compétences en matière de recherche expérimentale. »
En collaboration avec une partenaire de recherche – Liz Weller, également étudiante au doctorant – Simone Miklosi a utilisé les installations du Laboratoire pour les Écosystèmes Aquatiques Perturbés de la réserve. Des bassins d’eau, servant habituellement à abreuver le bétail, ont été remplis d’eau provenant du lac Hertel, lequel est situé près de la base de la montagne.
Pour le projet, les deux étudiantes au doctorat ont augmenté la température de l’eau de 4 degrés Celsius dans cinq bassins chauffés et y ont déposé des ménés. Cette hausse correspond à la température de la planète prévue pour 2100 selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Les cinq autres bassins, non chauffés, ont également accueilli des ménés.
« Certains gènes peuvent augmenter ou diminuer leur expression en réponse au stress thermique », explique Simone Miklosi.
L’étude de l’ARN des poissons permet de déterminer l’expression génique, et l’ARN dans leur foie et leurs branchies est « l’endroit où nous voulons vraiment regarder, parce que les changements des processus biologiques induits par le stress se reflètent davantage dans ces organes », explique-t-elle. Habituellement, il faut tuer les poissons, ce qui signifie que « nous ne sommes pas en mesure d’étudier les effets du stress thermique sur les populations de poissons les plus vulnérables, car nous ne pouvons pas prendre le risque de retirer ces poissons de l’environnement ». La surveillance des poissons d’eau douce demande également beaucoup de temps, d’efforts et d’interaction avec les espèces, ajoute-t-elle.
Or, sa recherche explore la possibilité de recueillir les mêmes renseignements sur l’expression génique à partir d’échantillons d’eau. En effet, en se déplaçant dans l’eau, les organismes rejettent du matériel génétique – des acides nucléiques environnementaux, notamment de l’ADN et de l’ARN. « Grâce à la collecte d’échantillons d’eau, on peut le faire très rapidement et à plus grande échelle. On peut faire appel à des citoyens scientifiques. »
À ce jour, une seule étude publiée a examiné la collecte d’ARN dans l’eau par rapport à la collecte d’ARN dans les tissus, précise Simone Miklosi. « Il faut plus de preuves que nous pouvons récupérer l’expression génique à partir de l’eau et qu’elle est représentative de ce que nous observons dans les tissus. Les résultats de ce projet apportent des preuves supplémentaires que nous pourrions examiner l’expression génique uniquement à partir de l’eau et étudier les effets du stress thermique sur les communautés les plus vulnérables. »
La relation entre la lumière du soleil et l’inactivation des virus
La réserve Gault a connu une année record d’utilisation en 2024, 40 projets de recherche ayant été réalisés jusqu’à présent contre 22 l’an dernier. Et pour la première fois, elle a accueilli des étudiants et étudiantes en génie sur le site dans le cadre d’un projet de recherche.
La réserve Gault a lancé les bourses de recherche étudiante en 2018. Pour les financer, elle utilise principalement des fonds provenant de son budget de fonctionnement, « parce que nous venons tout juste de commencer notre campagne de financement. Nous sommes novices dans ce domaine », explique le directeur adjoint David Maneli.
« C’est un endroit fantastique pour des études sur le terrain », ajoute-t-il. Il n’y a pas beaucoup de forêts vierges dans le sud du Québec. L’Université McGill s’est engagée il y a longtemps non seulement à protéger la montagne, mais aussi à établir un secteur de préservation très peu utilisé par les humains, ce qui, à mon avis, est unique dans le sud du Québec. »
Greyson He, B. Ing. 2023, a reçu une bourse de recherche Gault 2024 pour un projet qui consistait à simuler un déversement d’eaux usées dans des plans d’eau douce et à étudier comment – et dans quelle mesure – la lumière du soleil désactive les agents pathogènes.
Il a collaboré au projet avec le candidat au doctorat Yiding Wang. « Lorsque vous faites du travail sur le terrain dans la réserve Gault, vous devez avoir un partenaire », souligne Greyson He, étudiant à la maîtrise en génie civil. Les deux étudiants au cycle supérieur font partie du laboratoire de la professeure Stephanie Loeb, qui travaille sur la sécurité de la qualité de l’eau et la technologie de traitement.
« Imaginez que les eaux de ruissellement d’une ferme ou d’un égout débordent dans un lac et que, en aval, il y a une plage que les gens utilisent à des fins récréatives. Nous essayons de comprendre combien de temps il faudra pour que des agents pathogènes d’eaux usées soient inactivés de manière à ce que la plage soit sécuritaire », explique Stephanie Loeb.
Pour s’assurer de ne pas introduire de polluants dans le lac Hertel, différents types de sac ont d’abord été testés en laboratoire. Les étudiants ont conçu une plateforme flottante et ont immergé des sacs de dialyse contenant de petites quantités d’agents pathogènes dans le lac à des profondeurs différentes pour simuler des niveaux variés d’ensoleillement.
Après de nombreuses expériences préliminaires, les deux étudiants aux cycles supérieurs sont restés dans la réserve pendant cinq jours, en août, pour prélever des échantillons d’eau des sacs à dialyse toutes les deux heures, de 7 h à 21 h, « parce que nous nous intéressons à la capacité de la lumière de tuer les bactéries », précise Greyson He. Les bactéries peuvent mourir pendant la journée sous l’effet de la lumière du soleil, mais dans certains cas, elles s’autorégénèrent et se reproduisent la nuit, explique-t-il.
« Ils ont trouvé des résultats très intéressants qui montrent qu’il y a une régénération importante des agents pathogènes et que, chaque jour, il faut de plus en plus de temps pour que les concentrations de bactéries diminuent », précise Stephanie Loeb.
La beauté du cadre de recherche de la réserve Gault n’a pas échappé à Greyson He, qui fait régulièrement des randonnées dans la réserve et veut faire carrière dans la préservation de l’environnement.
Réalisant des recherches depuis plusieurs années, il se demandait si son travail était utile.
Pour lui, recevoir la bourse de recherche Gault pour un projet de sa propre initiative a été comme un vote de confiance et un encouragement à poursuivre dans cette voie. « Je suis reconnu en tant que chercheur indépendant, et je peux obtenir des fonds et faire quelque chose qui me passionne vraiment, dans un environnement que j’aime vraiment… C’était gratifiant pour moi, tant sur le plan personnel que sur le plan des études. »