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Je Donne

Changer le visage de la pharmacologie

Kenneth Melville, diplômé de McGill et pionnier, est la source d’inspiration d’un projet de bourse visant à accroître la diversité au sein du Département de pharmacologie et thérapeutique

Dr. Kenneth Melville, trailblazing McGill alumnus and second Black Chair of the Department of Pharmacology and Therapeutics

L’histoire du Dr Kenneth Melville, B. Sc. 1926, M.D., C.M. 1926, M. Sc. 1931, mérite d’être racontée plus souvent, selon le département de McGill où il a amorcé ses études universitaires.

« Il était l’exemple parfait d’un médecin-scientifique qui était “comme tout le monde” et qui vous donnait le sentiment que vous aussi aviez le potentiel pour réussir en sciences et en médecine », raconte le Dr Christopher Wright, petit-fils du Dr Melville, qui travaille depuis quelques années avec le Département de pharmacologie et thérapeutique pour mettre sur pied un projet au nom de son grand-père.

Né en Jamaïque en 1902, Kenneth Melville s’installe à Montréal pour suivre ses études à l’École de médecine de McGill au début des années 1920. « C’était à une époque où il n’y avait pas beaucoup de possibilités pour les personnes de couleur de décrocher un diplôme de médecine », explique le petit-fils. Sans céder au découragement, son grand-père a obtenu son diplôme avec les meilleures notes de sa promotion et a ensuite mené une carrière internationale prolifique en pharmacologie.

Il est ensuite retourné à son alma mater en tant que membre du corps professoral et, en 1953, il a été nommé directeur du Département de pharmacologie et thérapeutique. Il était le deuxième Noir seulement à détenir ce titre. Il est connu comme le premier titulaire de chaire de McGill originaire d’un pays en développement et il a également été l’un des premiers présidents de la Société de pharmacologie du Canada.

En l’honneur des réalisations remarquables de Kenneth Melville, le Département a créé la Bourse de recherche de premier cycle Melville en pharmacologie et thérapeutique, laquelle offre un financement annuel à un étudiant issu d’un groupe sous-représenté pour lui permettre d’effectuer un stage d’été dans le laboratoire de pharmacologie et de thérapeutique.

« C’est l’occasion de changer le visage de notre Département », explique le professeur agrégé Bastien Castagner qui est un joueur actif dans le comité de collecte de fonds de la Bourse aux côtés du président du Département, le professeur Gerhard Multhaup. Le comité a maintenant amassé les deux tiers de son objectif de 100 000 dollars qu’il espère atteindre d’ici l’attribution de la première bourse à l’été 2021.

Bastien Castagner fait remarquer que près de 70 années se sont écoulées depuis la nomination de Kenneth Melville à la présidence, et il n’y a aucune personne noire membre du corps professoral et très peu d’étudiants noirs aux cycles supérieurs du Département. Il trouve cela étrange et décevant, et c’est en grande partie ce qui l’a motivé à prendre part au projet de bourse.

« Nous devons réfléchir aux obstacles qui empêchent les étudiants de groupes sous-représentés de faire des études aux cycles supérieurs, et essayer de changer les choses », déclare le professeur Castagner. L’un de ces obstacles est le fait que les stages de recherche de premier cycle — éléments essentiels aux candidatures pour les programmes d’études supérieures — sont souvent non rémunérés et difficiles à obtenir.

La bourse Melville est conçue pour assurer aux étudiants qui appartiennent à des groupes sous-représentés dans le programme, et plus largement en sciences de la santé, un accès à ces opportunités de recherche clés qui constituent la base d’une carrière réussie en pharmacologie.

Actuellement, les étudiants noirs et autochtones sont les plus sous-représentés au sein du Département. Remédier à cette situation sera donc l’objectif initial du projet.

Un homme de principe

Surtout connu pour son travail de pionnier en pharmacologie cardiovasculaire, le Dr Melville est également reconnu comme un leader de la communauté caribéenne de Montréal et un ardent défenseur des droits de la personne.

En voici un exemple mémorable : le pharmacologiste a pris la défense d’un autre immigrant jamaïcain, Fred Christie, que l’on avait refusé de servir dans une taverne de Montréal parce qu’il était Noir. Lorsque M. Christie a décidé de poursuivre la taverne en justice, Kenneth Melville s’est porté volontaire pour présider le comité de collecte de fonds mis sur pied pour couvrir les coûts de cette longue bataille juridique. L’affaire a été portée devant la Cour suprême et a abouti au désormais tristement célèbre arrêt Christie contre York en 1939.

« En résumé, la Cour suprême a rendu la décision qu’il était acceptable pour une entreprise privée de faire de la discrimination », explique Bastien Castagner. Ce n’est qu’en 1975, avec l’adoption de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, que le jugement a été invalidé dans la province.

Malgré cette défaite, Kenneth Melville, en tant que personne empathique, soucieuse de sa collectivité et engagée dans la lutte contre l’injustice, a fini par jouer un rôle important pour l’égalité raciale au Canada.

Kenneth Melville avec sa fille Enid en 1949.

Kenneth Melville avec sa fille Enid en 1949.

: La photo est une courtoisied‘Alexsandra Wright.

Combiner le mentorat et la représentation

Pour le Mois de l’histoire des Noirs en 2019, le Département de pharmacologie et thérapeutique a contribué à l’organisation d’un événement avec l’Association jamaïcaine de Montréal pour célébrer Kenneth Melville et réfléchir à l’état de la diversité dans le milieu universitaire. Bastien Castagner explique que l’idée d’ajouter un volet de mentorat à la bourse est née de discussions qu’il a eues lors de cet événement.

En plus du stage d’été, les lauréats de la bourse Melville participeront à un programme officiel de mentorat qui se concentrera sur l’orientation professionnelle et l’aide aux étudiants pour qu’ils puissent se constituer un solide curriculum vitæ en vue de leurs études aux cycles supérieurs.

En faisant connaître le pharmacologiste Melville grâce à la bourse et au programme de mentorat, le Département espère montrer aux étudiants qui ne se voient pas souvent représentés dans les sciences de la santé que leurs objectifs de carrière sont possibles, et qu’il y a des gens dans leur entourage qui souhaitent leur réussite.

Avoir une communauté de soutien et des modèles de couleur inspirants peut tout changer, comme ce fut le cas dans la famille de Kenneth Melville. En effet, plusieurs de ses descendants sont devenus des professionnels de la santé — notamment sa fille, Enid Melville-Wright, B.A. 1955, M.D., C.M. 1959, et son petit-fils, Christopher Wright.

« C’est comme une maladie génétique — elle se transmet », rigole le petit-fils, qui est médecin-scientifique et cadre chez Cyclerion Therapeutics. Aujourd’hui, deux de ses quatre enfants envisagent de faire carrière en médecine.

Toutefois, pour les étudiants sans lien familial fort avec les sciences ou la médecine, il peut être difficile de s’imaginer faire carrière dans ces domaines.

Christopher Wright espère que les possibilités de recherche et de mentorat offertes par la bourse Melville contribueront à attirer une plus grande diversité d’étudiants en pharmacologie et en sciences médicales. « Laissons-les se rendre compte des possibilités qui s’offrent à eux et, avec un peu de chance, ils pourront devenir la prochaine génération de professeurs. »

Un pas dans la bonne direction

La direction de la Faculté de médecine et des sciences de la santé soutient cette initiative et reconnaît qu’il reste encore beaucoup de travail à faire.

« Il est inacceptable qu’en 2020, les Noirs et les autres populations minoritaires, notamment les Autochones, soient encore sous-représentés dans les programmes de sciences de la santé de notre pays », déclare le Dr David Eidelman, doyen de la Faculté de médecine et des sciences de la santé. « À la Faculté, nous avons pris l’engagement de corriger ce tort, et la bourse Melville, qui fait la promotion de la diversité tout en honorant l’héritage d’un pionnier de McGill, est un pas important dans la bonne direction. »

Bastien Castagner est du même avis et ajoute qu’il espère voir un jour un projet comme celui-ci dans tous les départements de la Faculté. « Mon rêve serait d’avoir quelque chose comme ça pour toutes les disciplines de sciences fondamentales. C’est un modeste effort à l’échelle du Département, mais ce serait vraiment bien si ça pouvait servir de coup d’envoi. »

Pour l’instant, lui et ses partenaires du comité de collecte de fonds travaillent à faire en sorte que la bourse Melville soit entièrement financée. Atteindre l’objectif de 100 000 dollars signifierait que le Département pourrait offrir la bourse chaque année dans un avenir proche, explique le professeur Castagner.

« Tout le monde souhaite changer les choses, mais il est parfois difficile de savoir ce qu’il faut faire et comment avoir une incidence, et même par où commencer, explique Christopher Wright. Je pense que cette bourse est un moyen très concret et direct pour améliorer les chances des personnes de couleur et des groupes sous-représentés. Et c’est quelque chose qui peut se faire maintenant. »

Pour en savoir plus sur les réalisations et l’influence de Kenneth Melville, visitez le site Web « Dr Kenneth Melville McGill Black Faculty Caucus ». Vous pouvez aussi suivre « The Melville Legacy » sur Instagram ou joindre la page Facebook.

Pour soutenir la Bourse de recherche de premier cycle Melville en pharmacologie, cliquez ici.