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Je Donne

L’intelligence artificielle s’attaque à la dépression

Une jeune pousse mcgilloise rafle la première place lors du Watson AI XPRIZE d’IBM et gagne 35 000 $

L’équipe d’Aifred pose pour une photo de groupe

Les membres de l’équipe d’Aifred, en compétition pour gagner le prix de 5 millions de dollars du Watson AI XPRIZE d’IBM, avec notamment ses cofondateurs Sonia Israel et David Benrimoh (au centre du premier rang).

La compétition n’est pas encore finie, mais la reconnaissance est un précieux stimulant.

La jeune pousse mcgilloise Aifred Health vient de remporter la première place et un prix intermédiaire de 35 000 $ lors de la plus récente étape du Watson AI XPRIZE d’IBM. Ce faisant, l’équipe est aussi devenue l’une des trente à se qualifier pour la phase suivante de cette compétition de quatre ans dotée d’un prix de cinq millions de dollars, dont l’ultime gagnant sera annoncé en 2020. Les XPRIZE sont des récompenses financières internationales visant à promouvoir les développements technologiques pour le bien de l’humanité.

Fondée par des étudiants de McGill, l’entreprise Aifred se situe à mi-chemin entre les royaumes de la technologie et de la médecine; elle s’apprête à apporter sa contribution pour l’un des besoins en santé les plus importants des sociétés actuelles.

L’équipe d’Aifred travaille en effet sur une application qui, dans sa phase initiale, aidera à la fois les cliniciens et les patients à effectuer un suivi et une optimisation des traitements contre la dépression et des résultats obtenus. Une deuxième phase, avec personnalisation par intelligence artificielle (IA), permettra de dire quel traitement devrait être utilisé chez un patient particulier.

La fin de l’année 2018 a été très occupée pour Aifred, dont le nom est basé sur un jeu de mots entre Alfred, le fidèle majordome de Batman, et AI pour artificial intelligence.

Au semestre dernier, l’entreprise a pris part au programme d’accélération MedTech du Centech, un incubateur technologique médical gratuit de 12 semaines dirigé conjointement par la Faculté de médecine de McGill et l’incubateur de jeunes pousses de l’École de technologie supérieure, Centech. Elle a aussi terminé le programme Startup en résidence de Desjardins Lab.

Ce dur labeur porte ses fruits, comme en témoigne le récent résultat au XPRIZE.

« Pour le XPRIZE, le produit doit être testé dans des conditions réelles », explique David Benrimoh, M.D.C.M. 2016, résident en psychiatrie à McGill et cofondateur ainsi que directeur général d’Aifred.

« C’est formidable pour nous parce que nous offrons une application clinique et que nous avons déjà reçu l’approbation conditionnelle de protocoles d’essais cliniques de la part de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas. »

David Benrimoh explique le défi qui motive le travail de l’équipe : « C’est vraiment très décevant de savoir que nous sommes si mauvais pour prévoir quel patient répondra bien à quel traitement. »

La méthode actuelle d’essai-erreur utilisée pour les traitements contre la dépression peut entraîner un allongement de la période de traitement et une aggravation des symptômes.

C’est particulièrement frustrant parce qu’on pourrait réussir à mieux traiter les patients.

« Nous disposons des meilleures lignes directrices et d’excellentes données probantes, mais elles n’existent pas dans des formats accessibles cliniquement », explique Sonia Israel, B. Sc. 2018, cofondatrice d’Aifred et directrice des partenariats.

« Au lieu de cela, elles sont publiées sous forme de documents de 20 ou 30 pages qu’aucun médecin n’a le temps de parcourir dans les quelques rares minutes qu’il consacre à chaque patient. »

C’est ici que l’IA entre en scène, afin de rendre ces informations accessibles au médecin pour un patient particulier. À terme, Aifred espère aller au-delà de la dépression afin d’aider à traiter d’autres troubles de santé mentale.

Sonia Israel s’intéresse depuis longtemps à la psychiatrie et aux neurosciences : elle a en effet vu des amis et des membres de sa famille recevoir des traitements contre la dépression.

« J’ai remarqué que les traitements que les patients recevaient ne semblaient pas s’appuyer sur de solides données probantes », indique-t-elle.

L’objectif d’Aifred est de mieux outiller non seulement le médecin, mais également le patient.

« Nous mettons cette application au point pour permettre une prise de décision conjointe, explique David Benrimoh. Le patient travaille main dans la main avec le clinicien : le patient fournit les données et le clinicien les interprète, mais c’est ensemble qu’ils prennent la décision, lors de la consultation. »

Récompenses et soutien

Les personnes à même de juger l’approche technologique d’Aifred non seulement pour ses objectifs sociaux ambitieux, mais aussi pour son aspect intelligence artificielle émettent des commentaires extrêmement favorables.

L’équipe, qui est l’une des rares dirigées par des étudiants, a également remporté la deuxième place lors du concours d’innovation clinique CLIC de McGill et le Prix de la famille Hakim pour l’innovation en soins de santé en mai 2018.

En plus d’un prix de 5 000 $, qui a permis à Sonia Israel de se rendre à Boston pour représenter Aifred lors d’une « journée démo » de McGill afin de rencontrer des investisseurs en capital de risque, un ensemble de solutions applicatives valant 40 000 $ a contribué à l’essor de l’entreprise. Grâce à cet ensemble, Aifred a désormais accès au Centre de simulation et d’apprentissage interactif Steinberg de McGill, où l’équipe planifie un essai avec des médecins placés dans des conditions de simulation.

Aifred reçoit des encouragements de toute part. L’entreprise a remporté un Global Annual Achievement Award for Artificial Intelligence (prix mondial annuel de réalisation en intelligence artificielle) en 2018-2019 dans la catégorie Meilleure utilisation de l’IA en alimentation, santé et médecine. En octobre dernier, Aifred a représenté McGill à Forces AVENIR, qui récompense les étudiants exceptionnels du Québec, et a à cette occasion remporté le prix du Projet par excellence, assorti d’un montant de 15 000 $. L’entreprise a également été l’un des quatre lauréats de la subvention d’innovation Joule de l’Association médicale canadienne en 2018.

Le facteur McGill

Sonia Israel et David Benrimoh insistent tous deux sur l’importance capitale du soutien de leur alma mater.

« Le soutien que nous avons reçu à tous les niveaux nous a vraiment beaucoup aidés à augmenter progressivement la portée de notre produit afin d’avoir un impact réel », constate Sonia Israel, en citant notamment l’aide reçue du Building 21, le nouvel espace d’apprentissage de McGill, mais aussi du Bureau des études et de la vie étudiante et de la Faculté de médecine.

Personnellement, Sonia Israel se consacre entièrement à Aifred. Pour l’instant, elle reporte à plus tard ses études supérieures à McGill, entièrement financées, afin de poursuivre le projet.

« Mon désir le plus profond est de repousser les frontières de la psychiatrie clinique, afin de constater les répercussions en pratique clinique et de voir si cela aide les gens », explique-t-elle.

Le facteur Montréal

David Benrimoh estime quant à lui que Montréal a l’immense avantage de se trouver au carrefour de l’intelligence artificielle, des neurosciences et de la médecine.

« Montréal, et McGill en particulier, se démarque dans ces trois domaines. L’interdisciplinarité constitue également l’une des grandes forces de la ville, comme l’est la confiance dans le travail commun de personnes issues de différents domaines. J’adore ça. »

Il remarque que la technologie médicale basée sur l’intelligence artificielle est un nouveau domaine dont l’émergence est assez récente. « Il faut expliquer aux investisseurs que les cycles de développement sont relativement longs, mais qu’une fois que l’une de ces applications est créée, le bénéfice potentiel est immense en raison du nombre de personnes que l’on peut joindre », explique-t-il.

Sonia et David sont catégoriques au sujet de leurs objectifs. Comme le dit David Benrimoh, « nous tentons d’apporter une véritable solution à ces problèmes qui coûtent des milliards de dollars à l’échelle mondiale et qui touchent des millions de personnes ».

Obtenez des renseignements complémentaires sur le Concours d’innovation clinique CLIC de McGill de la Faculté de médecine, financé grâce aux donateurs, ou apportez-lui votre soutien en cliquant ici.