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Je Donne

La vulgarisation rend la science accessible à tout le monde

McGill fait sortir la science de la salle de classe au moyen de la vulgarisation

Une personne qui tient dans une main une fiole alors qu’elle anime une démonstration scientifique.

Enfant, Jessica Ford se faisait dire que creuser dans la boue pour trouver de petites créatures n’était pas pour les filles. Qu’elle n’était pas assez intelligente pour étudier les sciences. Qu’elle ne cadrerait jamais avec ce domaine. Aujourd’hui, elle termine un doctorat en herpétologie à McGill où elle étudie les crapauds et d’autres êtres vivants rampants aussi laids que beaux pour lesquels elle se fascine depuis l’enfance.

« Beaucoup de gens se disent “Je ne suis pas apte pour les sciences” dès l’âge de 14 ans, et c’est particulièrement vrai pour les femmes, les Noirs, les Autochtones et les personnes de couleur, déplore Jessica Ford. Et c’est en grande partie parce que ces personnes n’arrivent pas à se projeter dans ce type d’emploi. Avoir une meilleure représentativité constitue pour nous un objectif énorme. »

La vulgarisation scientifique peut changer les perceptions et ouvrir un monde de possibilités qui sont simplement inconnues. Entre autres, c’est l’occasion de faire de la place à des personnes qui ont rarement cette chance. Pour Jessica Ford, il s’agit d’un moyen de faire bouger les choses en sciences, technologie, ingénierie, mathématiques et médecine (STEMM de l’anglais science, technology, engineering, math, and medicine) grâce à une initiative étudiante qu’elle a cofondée en 2017 : STEMM Diversity @ McGill.

Ce travail peut prendre de nombreuses formes. STEMM Diversity a commencé modestement. À l’origine, l’idée était de produire une affiche éducative. Aujourd’hui, plus de cinq ans plus tard, le groupe est très fier d’avoir mis sur pied de nombreux ateliers, un programme de mentorat, des activités scolaires et une exposition. Même un livre de coloriage est offert aux enfants, ou plutôt à tous les enfants, afin qu’ils puissent se projeter comme les scientifiques de demain.

Jacky Farrell, conseillère au programme de vulgarisation scientifique pour la Faculté des sciences de McGill, fait écho au besoin de diversité et de visibilité dans les efforts de vulgarisation. « Nous avons une grande diversité d’étudiants à McGill issus de milieux différents et aux horizons différents, dit-elle. Je crois que c’est vraiment spécial pour un enfant lorsqu’il arrive à s’identifier à la personne qui s’est invitée dans sa classe. »

STEMM Diversity n’est qu’une des nombreuses initiatives de vulgarisation scientifique promues par McGill, mais l’objectif commun est de mieux connaître la science au grand public d’une manière ou d’une autre.

Chaque année, le Groupe Outreach du Département de chimie prend part aux activités de la Nuit Blanche, une tournée nocturne des arts et de la culture dans la ville de Montréal. Les participants peuvent assister à des démonstrations de chimie adaptées aux familles en français et en anglais tout au long de la soirée dans le Pavillon de chimie Otto Maass Chemistry du centre-ville.

La Réserve naturelle Gault de McGill offre au public la chance de découvrir la flore et la faune locales et d’en apprendre davantage sur la biodiversité et la recherche écologique tout en profitant du plein air. Cette année, un nouveau projet vise à créer des programmes pour aider les enseignants des écoles primaires à organiser des visites autoguidées pour leurs classes.

D’autre part, des étudiants de McGill en chimie et de clubs de vulgarisation TSI-Physics et Mission Cerveau se rendent dans les salles de classe des écoles primaires et secondaires locales pour partager leurs connaissances scientifiques au moyen d’activités interactives et ludiques. Le Musée Redpath offre aussi un accès à l’histoire naturelle grâce à sa collection sur place, aux visites guidées et autres événements qui y sont organisés. À la grandeur de l’Université, il est également possible pour les étudiants de faire connaître leurs travaux de recherche auprès des élèves du secondaire et du cégep dans le cadre de l’initiative La science, c’est sérieusement cool. Tout cela n’est qu’un bref survol.

La vulgarisation au niveau des collectivités peut élargir le champ d’action de l’Université en soi, car le rôle du public y est reconnu en tant que parties prenantes du processus. D’ailleurs, comme les contribuables financent la recherche, il est donc dans l’intérêt de l’Université de faire connaître leurs travaux et d’être à l’écoute des collectivités pour être au fait de leurs préoccupations et de leurs besoins.

Mais au-delà de cela, informer le public, mais aussi l’inclure, cadre en tout point avec les priorités de l’Université. « Tout ce que nous faisons est pour la société », affirme Alexander Wahba, associé académique au Département de chimie et superviseur du Chemistry Outreach Group. Et dans tout ce qu’entreprend la société, les sciences en font partie. Que nous nous questionnions sur notre propre alimentation ou sur les complexités de la pandémie de COVID-19, les scientifiques peuvent nous apporter des informations étonnantes. La vulgarisation permet de combler ce fossé, soutient Alexander Wahba, et de démontrer aux gens que le savoir est à leur portée. C’est un moyen de lutter contre les effets de la désinformation généralisée et de la « chimiophobie », ou de cette peur irrationnelle des produits chimiques tout en fournissant des réponses réelles en dehors de la salle de classe. En peu de mots, la vulgarisation favorise la prise de conscience et la mobilisation.

L’Organisation pour la science et la société cherche depuis longtemps à rétablir les faits concernant différentes questions et à déboulonner des mythes populaires. Entre autres, le Symposium scientifique pour le public Trottier, organisé par l’Organisation pour la science et la société en septembre dernier, en est un bon exemple. Orienté sur la science dans les sports, le symposium de cette année a accueilli des experts qui ont parlé de la façon dont la science et le langage scientifique sont « utilisés et détournés » à des fins politiques, économiques et sociales.

En aidant les étudiants à devenir de meilleurs éducateurs, on crée un important contrepoids à ce genre de science de pacotille endémique.

Joe Schwarcz et Dick Pound qui prennent la parole dans le cadre du Symposium scientifique pour le public Trottier.

Joe Schwarcz et Dick Pound qui prennent la parole dans le cadre du Symposium scientifique pour le public Trottier.

Bruce Lennox, professeur de chimie et doyen de la Faculté des sciences, considère la vulgarisation comme un élément essentiel de la formation de la prochaine génération de scientifiques. « Ils deviennent les ambassadeurs de ce qu’on appelle la science, et cela demande un cadre, beaucoup de responsabilités », dit-il des étudiants en sciences de McGill. En d’autres termes, la vulgarisation n’est pas seulement l’apanage des clubs étudiants et des initiatives bénévoles ; elle fait partie intégrante de la formation d’un scientifique. C’est une des raisons pour lesquelles la science est si importante. « Nous nous mettons complètement à l’égard de la société si nous ne donnons pas à nos étudiants ces expériences qui deviennent pour eux des compétences, des cadres de travail et des voies à suivre, explique-t-il.

« Le plus grand défi que doivent relever les étudiants est de parler de sciences à l’aide de métaphores et d’analogies qui sont, comme vous le savez, des outils de communication », ajoute-t-il afin de souligner les lacunes potentielles des scientifiques qui ne sont pas formés pour parler au grand public. « Je dis tout le temps à mes étudiants de commencer à se pratiquer pendant un souper à la maison. Si les gens se lèvent et quittent la table parce que vous leur dites que c’est une réaction SN2 et non une réaction SN1, il y a un message là-dedans. »

Afin de donner aux étudiants en sciences de McGill les bons outils pour surmonter ce type d’obstacles, la Faculté offre, par l’intermédiaire du Programme de vulgarisation scientifique, une formation spécialisée fondée sur des données probantes qui porte sur différentes manières de vulgariser efficacement la science aux élèves du préscolaire jusqu’à la fin de l’école secondaire. « Lorsque les étudiants de McGill vont dans les écoles et les salles de classe, les enseignants qui les accueillent s’attendent à ce que nos étudiants sachent interagir de manière efficace avec leurs élèves pour les intéresser aux sciences, explique Jacky Farrell. Je pense qu’il est également important pour nos étudiants de développer leur propre style d’enseignement. D’ailleurs, c’est la grande prémisse de tout cela, parce que ces mêmes étudiants, qu’ils enseignent ou non dans une université ou une école dans l’avenir, auront toujours à composer avec des occasions où ils devront enseigner, et seul le contexte changera. »

Le poste de Jacky Farrell au sein de la Faculté des sciences témoigne à quel point la vulgarisation scientifique est une priorité. Peu d’universités ont confié cette tâche à un membre du personnel à temps plein. Cette fonction exclusive permet à Jacky Farrell de superviser le déploiement de la vulgarisation tout en créant une vision unifiée plutôt que d’adopter une approche fragmentaire. Le Programme de vulgarisation scientifique agit comme une plaque tournante pour les stratégies et les initiatives de vulgarisation de la Faculté en matière de diffusion des sciences auprès du grand public.

Évidemment, la vulgarisation coûte de l’argent. Bruce Lennox et Jacky Farrell puisent dans les fonds du Département et des donateurs pour une grande partie de leur travail. Les réalisations des étudiants et du personnel sont en grande partie bénévole, mais les frais de déplacement, d’équipement et d’autres frais s’additionnent rapidement.

« Le Programme de vulgarisation scientifique existe grâce au financement des donateurs », explique Jacky Farrell. « Nous en sommes extrêmement reconnaissants. »